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Anne-Marie Sawadogo, AFD : "Face à l'urgence de faire, il faut accepter de se mettre à l’école de l’Afrique"




Chargée de mission régionale Sahel à l'AFD, Anne-Marie Sawadogo était l'une des 8 panélistes invitées, mercredi 23 mars, au webinaire international*, organisé en marge de la 66e session des Nations Unies de la Commission sur le Statut des Femmes.

 
Un événement, placé sous le thème "Autonomisation des femmes, paix et sécurité face à la crise climatique", où Mme Sawadogo a centré son propos sur la nécessité d'être à l'écoute du terrain pour découvrir des solutions endogènes; et la nécessite pour les partenaires techniques et financiers de faire preuve d'agilité dans leurs méthodes d’accompagnement et de financement, pour mieux faire face aux urgences d'agir.

Propos intégral




Bonjour,


Mesdames, messieurs, chers partenaires bonjour. C’est un réel honneur pour moi d'être à cette tribune et une belle opportunité de donner et de recevoir les unes des autres, les uns des autres.


Merci à tous ceux qui nous ont rejoints ici pour contribuer au débat sur un sujet plus que jamais d’actualité : « l’autonomisation des femmes, la paix, la sécurité face aux changements climatiques »


Pour ma part, et au nom de l’AFD, je centrerai mon propos et ma contribution sur la base de mon expérience de terrain sur la zone Grand Sahel, périmètre qui regroupe le Burkina Faso, le Niger, le Mali, la Mauritanie, le Sénégal et le Tchad.


Mon propos sera en deux parties. Avant de venir sur l’offre de l’AFD en matière de genre, je voudrais partager avec vous quelques leçons apprises du terrain Pas beaucoup, il y en a plusieurs retenues, mais je m’arrêterais juste sur quelques-unes.


Ce que nous ont exprimé nos collègues du Mali nous en donne un bon aperçu. Le Sahel est une région où se conjuguent à la fois la crise climatique, la crise sécuritaire et la crise alimentaire.


Et elles se nourrissent mutuellement, dans un cercle vicieux qui fait qu’on est confronté à une situation extrêmement grave, qui impose à une véritable urgence d’agir aujourd’hui.


Il est clair que la crise climatique est un facteur d’aggravations des fragilités. Elle exacerbe les dynamiques de conflits et affecte les groupes les plus vulnérables, à savoir les femmes et les enfants.


Et les témoignages de nos sœurs l’ont parfaitement illustré tout à l’heure.


Ça veut dire que lutter contre la crise climatique c’est véritablement œuvrer aussi pour la prévention et l’émergence des conflits. Et nous sommes convaincu.e.s que l’autonomisation des femmes est un puissant levier pour cela.


C’est la raison pour laquelle l’AFD en a fait un de ses axes prioritaires dans sa stratégie d’intervention au Sahel.


Pour partager les leçons que j’ai apprises et si je devais résumer tout ça c’est qu’aujourd’hui il y a urgence de faire. Et pour ça, il faut, pour moi, accepter de se mettre à l’école de l’Afrique.





Je retiens de mes nombreuses missions que j’ai pu avoir sur le terrain, de tous ces échanges avec ces femmes que j’ai eus avec ces femmes que nous avons pu rencontrer.


Et je vous assure, des femmes courageuses, inventives, résilientes (…) Ce que je retiens est que ces femmes ont elles-mêmes des solutions. Des solutions pertinentes, efficaces, insoupçonnées mêmes, qui peuvent être génératrices de revenus, face à certains défis auxquels nous devons tous faire face ensemble collectivement.


Vraiment une première leçon que je tire est qu’il faut être à l’écoute du terrain, de ses expertises, de ses usages, de ses intelligences, de son pragmatisme.


Ecouter c’est pouvoir s’ouvrir à des solutions endogènes efficaces. Je vais prendre juste un exemple. Je reviens du Tchad où j’ai rencontré les femmes Bororo, qui est une population nomade.


Ces populations détiennent un savoir traditionnel qui est une mine d’or pour la résilience face aux changements climatiques, mais n’est pas mise au service de la communauté.


Mais les femmes le font à petit échelle, avec les appuis qu’elles ont. D’autres occasions nous permettront d’en parler d’avantage.


Il y a aussi le recyclage du sachet plastique au Burkina, au Mali. Ce n’est plus simplement un déchet mais une matière première d’une activité génératrice de revenus (…) Je ne m’attarde pas d’avantage.


Tout ça pour vous dire qu’écouter est un prérequis fondamental avant de mettre en branle toute la machine que nous avons, nous, les partenaires techniques et financiers (PTF) si on veut vraiment être au service des projets locaux des organisations, des initiatives de la société civile.


Deuxième leçon que je pourrai partager avec vous par rapport à ce que m’a enseigné le terrain est l’agilité et la réactivité dont nous devons faire preuve. Nous les PTF mais aussi les acteurs publics et étatiques.


Parce que notre demain à nous, avec la lourdeur des procédures que nous avons, est peut-être le trop tard de l’autre. Et pendant ce temps des vies se perdent le temps que nous déclenchions concrètement l’aide sur le terrain.


Donc franchement, les acteurs publics, étatiques, les PTF doivent véritablement être plus agiles dans leurs méthodes d’accompagnement et de financement si nous voulons répondre aux urgences. Il faut aussi peut être accepter de décentraliser les niveaux de décision qui autorisent plus d’innovations et de flexibilité afin de répondre de façon adaptée aux besoins et à l’urgence du terrain.


Et troisième et dernière leçon et je pense que ça n’est pas une nouveauté pour nous tous et que si le climat est un bien public mondial c’est que nous avons besoin les uns des autres pour adresser une crise mondiale qui nous impacte tous.


Et qui nous impactera tous de plus en plus dans ce #mondeencommun. Un monde en commun, ceux qui connaissent l’AFD sont familiers de ces termes qui sont le slogan de l’AFD, qui incarne tout notre ADN, toute notre vision.






Et je peux vous dire qu’au-delà de ce monde en commun, nous sommes dans un nouveau paradigme. Aujourd’hui l’AFD dit : « Du côté des autres ». C’est le slogan qu’elle a utilisé pour son 80e anniversaire.


Et « du côté des autres » c’est aussi s’adapter à l’autre, s’appuyer sur ses forces, comprendre ses écosystèmes culturels et sociaux. C’est la troisième leçon que j’ai apprise.


Juste quelques illustrations. Quand on parle d’autonomisation des femmes, sans inclure les hommes dans la démarche, on est sûr qu’on passe à côté. Il faut introduire une certaine diplomatie sociale, qui renvoie au concept de masculinité positive, pour qu’on puisse asseoir nos ambitions.


C’est la même chose avec différentes catégories d’acteurs de la société civile qu’il faut intégrer.


J’allais dire qu’il faut aussi que nous adaptions nos approches de formation. Nous sommes tous d’accord qu’il va falloir informer, sensibiliser, plaidoyer. Mais il faut se rejoindre mutuellement si l’on veut conjuguer ensemble. Et pour cela il faut parler le même langage.


Or nous savons très bien qu’une bonne partie du public que nous adressons ne sait pas lire, ne sait pas écrire. Et quand il le sait, ça n’est pas toujours dans la même langue que nous.


Donc il faut qu’on accepte d’utiliser des moyens de communication, de langages qui soient adaptés à ces publics. Et je peux vous dire que les femmes, quand vous échangez avec elles, elles ont des solutions et des méthodes pour le faire. Je n’ai malheureusement pas le temps de développer ici.


Il y a aussi une question de posture. Il faut qu’on ait plus d’humilité si on veut s’adapter et s’appuyer sur ce qu’ils peuvent nous partager comme savoirs.


Je parlais tantôt des savoirs traditionnels des Bororo. Il faut savoir que les détenteurs de ces savoirs traditionnels n’acceptent de transmettre que dans leur langue qu’à des personnes d’une certaine probité.


Et tout ça c’est une mine d’or qui doit être mis au service de toute la communauté. Alors il va falloir qu’on s’adapte aussi pour pouvoir en profiter.


Je ne m’étalerai pas d’avantage sur les quelques leçons que j’ai retenues du terrain mais c’est seulement pour vous dire qu’on a tout intérêt à recevoir et à donner tous ensemble, à se mettre au niveau des uns des autres.


Maintenant, quelles sont les réponses de l’AFD par rapport à cela ?


Pour ceux qui ont écouté le discours du Président Emmanuel Macron au Burkina Faso, rappelez-vous qu’il a insisté sur le fait que l’autonomisation des jeunes filles et des femmes était un levier fondamental au Sahel.


Et ça nous a donné le ton, à l’AFD. Au Sahel très concrètement, deux des axes prioritaires de notre stratégie d’intervention, c’est d’une parte de promouvoir l’autonomisation des filles et des femmes et d’autre part de contribuer à prévenir et endiguer les conflits violents dans une approche territoriale.


Au Sahel, cela se met en œuvre très concrètement à travers le partenariat EDIFIS et le Fonds de Soutien aux Organisations Féministes. Et il y a bien d’autres offres que l’AFD développe.


J’ai mis dans le tchat les informations correspondantes.






Mais en deux mots le partenariat EDIFIS c’est un partenariat qui cherche à impulser, à contribuer à la dynamique pour faire émerger des initiatives, des actions conséquentes, et dans la durée, avec l’ensemble des acteurs en présence sur la problématique du genre. Et de façon très intégrée.


Le partenariat EDIFIS fait une offre à l’ensemble de la communauté des acteurs, des offres de financement et d’accompagnement à l’Etat, mais aussi à la société civile à travers le Fonds Genre Sahel. Elle apporte et enfin à l’Agence Française de Développement et les autres partenaires techniques et financiers des moyens aux équipes pour monter en compétence sur la question de genre.


Cela a permis de soutenir divers projets qui sont déjà en œuvre sur le terrain.






Quant au Fonds de Soutien aux Organisations Féministes, qui intervient sur la thématique « Femme, paix et sécurité », nous allons lancer dès lundi (28 mars), un appel à projets qui offre des opportunités de financement aux acteurs qui souhaitent s’engager activement sur l’agenda « Femme, paix et sécurité ».


Un dernier mot pour vous dire qu’il est temps d’agir et soyons à l’écoute des uns et des autres. Je vous remercie.



Anne-Marie Sawadogo née Zouré

Chargée de mission régionale SAHEL LIEN SOCIAL : (Genre - Industries Culturelle et Créative - Sport et Développement) à la Direction régionale Grand Sahel de l’AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT.

Juriste de formation avec une expertise en gestion des systèmes éducatifs. 25 ans dans les métiers du développement : après 15 ans d’accompagnement dans le secteur de l’Education au Burkina Faso, elle est en charge du Genre depuis 2019 et désormais également des Industries culturelles et créatives et du Sport et Développement au Sahel.



*les autres panélistes du Webinaire, organisé par Adéquations et l'AFD :

  • Ouafae Sananès, AFD (modération) ;
  • Yveline Nicolas, Adéquations (introduction) ;
  • Delphine O, Ambassadrice, ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ;
  • Djenaba Birane Wane Ndiaye, ONU Femmes Dakar ;
  • Sayda Hessami, Aide humanitaire et Journalisme ;
  • Simone Diouf, Réseau Mondial des Femmes Bâtisseuses de la Paix ;
  • Dr. Diallo Deidia Kattra, Coalition femmes, climat et conflit Mali 
  • Mama Koite Doumbia, Présidente de la Plateforme des Femmes leaders du Mali Présidente du Réseau MUSONET


Plus d'informations sur les fonds évoqués dans l'intervention d'Anne-Marie Sawadogo :


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